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The Wretched of the Earth by Frantz Fanon

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mariebrunelm's review against another edition

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challenging dark reflective medium-paced
Cet essai sur la décolonisation est publié en 1961, en pleine guerre d’Algérie. Le contexte est important car Fanon, né en Martinique, a travaillé comme psychiatre pendant les années 1950 en Algérie, et y a constaté les ravages du colonialisme sur les corps et les esprits. Son livre articule ainsi plusieurs notions traitées dans des chapitres distincts mais évidemment liées entre elles de manière profonde. Il commence par un chapitre sur la violence coloniale, ses racines et ramifications, ainsi que ses multiples conséquences et les clichés qui lui sont associés. Il traite de violence physique mais aussi institutionnelle, et du fait que les colonisés sont réduits à y répondre par leur propre forme de violence.
Fanon explore par la suite la notion de conscience nationale, notamment à travers la place fondamentale de la population dans son ensemble, et pas seulement celle des élites. Il récuse l’idée selon laquelle les masses sont forcément stupides et doivent être traitées comme des enfants. Le chapitre suivant est consacré à la culture et à l’émergence d’une culture nationale qui ne doit pas simplement reprendre les codes de la culture du pays colonisateur (c’est-à-dire européen) mais doit célébrer les particularités très spécifiques du pays dans toute sa diversité.
Le dernier chapitre, découlant directement de la profession de Fanon, dresse une liste des conséquences tragiques de la colonisation sur la santé mentale des colonisés : il y est question de troubles psychiatriques à travers des exemples tirés directement des rapports de Fanon, qui rejette d’avance les critiques qui pourraient lui être adressées d’avoir présenté au grand jour des cas relevant du secret médical, d’une part en anonymisant strictement les patients, et d’autre part en expliquant que l’essentiel de ses patients sont des victimes du colonialisme, et que leurs cas doivent figurer dans l’exposé des horreurs induites par les colons.
L’essentiel de cet essai est assez accessible. Des particularités de langage peuvent bien sûr heurter les sensibilités modernes, car Fanon emploie des termes jugés racistes mais qui étaient monnaie courante à l’époque. L’auteur entame son discours comme s’il décrivait les mécanismes universels de la colonisation et de la résistance des colonisés, mais il apparaît rapidement qu’il parle spécifiquement de l’Algérie, dont il a vécu la réalité lors de l’élaboration de ce texte. Et si vous n’étiez pas déjà informé.e des abominations que la France y a perpétrées, et bien je vous recommande de vous renseigner au plus vite. La France n’a pas à faire la morale à d’autres pays colonisateurs lorsqu’elle pratiquait elle-même les sévices inhumains qu’elle reproche à demi-mots aux autres.
C’est grâce à R.F. Kuang et Babel que j’ai découvert ce livre, car elle le recommande dans sa bibliographie de l’édition Waterstones. On voit sans mal ce qui lie les ouvrages, tant la violence coloniale en est la colonne vertébrale. C’est un ouvrage que je recommande, pas seulement pour le Black History Month, mais si vous avez besoin d’un autre incitatif en plus de la recommandation de R.F. Kuang, le voilà.
 Enfin, l’exploration des mécanismes de la tyrannie coloniale permet des parallèles affligeants et nombreux avec des situations très actuelles, ce qui est une raison de plus de lire ce livre. 

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