A review by okenwillow
Mudwoman by Joyce Carol Oates

5.0

Ce que j’aime chez JCO, c’est qu’on est rarement déçu. Une nouvelle fois elle me bluffe avec son histoire de destin de bonne femme. Meredith Ruth Neukirchen a été trouvée dans les marais agonisante, abandonnée par sa mère folle à lier. Revenue de loin, elle ira également loin, puisqu’elle accèdera au poste de présidente d’une grande université, une première pour une femme. Oubliant sa vie de femme, et sa vie tout court, elle se dévoue tout entière à sa charge, elle doit à ses parents adoptifs quakers un certain humanisme et une grandeur d’âme irréprochable. Sa charge exige d’elle une retenue constante, un recul permanent face au contexte politique et social. Son dévouement absolu et ses convictions personnelles pèseront lourd sur ses épaules, de même que son statut de femme, par forcément accepté par le milieu universitaire dans lequel elle évolue, malgré les idées progressistes qui circulent. Trop de contradictions et de conflits intérieurs vont peu à peu plonger « M.R » dans le délire, jusqu’à confondre le réel et le fantasme. Surmenée physiquement, intellectuellement, et émotionnellement, il lui faudra atteindre ses limites et le burn-out avant d’affronter son passé, son enfance et les non-dits qui ont accompagné son adoption. Le passé de Mudwoman est lourd de questions sans réponses, de souvenirs flous mais intenses. La relation avec ses parents reste ambiguë, car bien qu’aimants et dévoués, le secret et le silence entretenus n’ont pas facilité les choses pour Mudgirl. Le même silence qu’elle doit respecter dans son milieu universitaire, pour ne surtout pas faire de vague, et conserver une neutralité de tous les instants. L’auteur nous donne également un aperçu peu reluisant du milieu universitaire, soi-disant progressiste et moderne, mais finalement très hypocrite.

Oates jongle avec le présent et le passé, le réel et le fantasmé. M.R. ne fait plus trop la différence, le lecteur non plus. Le dénouement, s’il est cohérent, n’en demeure pas moins abrupte, laissant le lecteur un peu perplexe, voire carrément sur sa faim. J’aime les fins ouvertes, mais à ce point-là, on frôle l’inachevé. Malgré ce tout petit bémol, Mudwoman reste du très grand Oates, un poil en-deçà cependant, de La fille du fossoyeur ou des Chutes.