A review by mizlitterature
Ma vie rouge Kubrick by Simon Roy

4.0

C'est la deuxième fois que je lisais ce livre. (Oups, je n'étais pas encore membre Goodreads lors de ma première lecture, en août 2015.)

La première fois, j'étais totalement emballée par les liens entre la vie de Simon Roy-narrateur et le film The Shining . Je trouvais ça complètement fou que l'auteur ait pensé tout son texte, dans les moindres détails, à l'aide du film. Mais le style me gossait un peu, parce que l'auteur prend constamment son lecteur par la main. Par exemple, il s'assure qu'il connaît la signification de «TOC» en écrivant à sa suite (trouble obsessionnel-compulsif) . (Dans l'éventualité où je ne saurais pas ce que ces trois lettres écrites en majuscules côte à côte voudraient dire, je pense que je les googlerais.) Il répète aussi constamment les noms de ses personnages. Combien de fois ai-je lu «ma fille, Aurore». Je saiiiis qu'elle s'appelle Aurore! Tu ne m'as parlé que d'un enfant et c'est elle!

Bref. Aujourd'hui, j'ai terminé ma seconde lecture et on en a parlé en FRA 2707 - Pratique des genres. Et c'était super intéressant! Je n'avais pas bien saisi le malaise grandissant, l'inquiétante étrangeté qui se crée au fil de la lecture. En abordant la généalogie macabre, les histoires qui se répètent ad nauseam, le lecteur en vient à se demander si le narrateur ne pourrait pas lui-même tuer son enfant et/ou se suicider. En plus, l'auteur reprend des procédés stylistiques du film de Kubrick et les transpose dans son récit en les détournant, les retravaillant. (Pensais-tu que je ne t'avais pas vu, «s42ort», à la page 160?)

C'est un texte sur le film de Kubrick, sur des anecdotes de tournage, mais c'est aussi une narration écrite au présent du drame que représente le suicide d'une mère, une narration au passé des multiples visionnements du film, une narration au passé où Jacques Forest a failli tuer ses enfants juste après sa femme, une série de faits divers violents, un questionnement sur le rôle de la littérature. Est-elle responsable des tragédies, des meurtres de masse, lorsqu'on sait que les tueurs étaient de grands fans de l'œuvre?
Et c'est aussi le récit d'une paranoïa qui fonctionne . Qui a un fondement.

Finalement, je trouve que c'est bien fait. Même si, maudit, je le sais que sa fille s'appelle Aurore.